Monday, December 29, 2014

Ma vision du monde 2.0

Cet article est un deuxième "cliché" de ma vision du monde. Je le considère toujours comme un brouillon, un document de travail, en constante évolution. L'année passée, j'avais insisté sur la thématique du credo et de la croyance, parce que c'était pour moi l'occasion de me positionner par rapport à certains reproches (je serais quelqu'un "qui ne croit en rien", selon certaines personnes), mais c'était aussi un clin d'oeil à What I Believe de Bertrand Russell, que j'avais lu en 2013.

Depuis, j'ai décidé d'utiliser plutôt la terminologie "vision du monde", qui correspond plus à la nature de cet exercice. En allemand, on parle de Weltanschauung et en anglais, de world view. Cela me permet aussi de critiquer indirectement la notion de relativisme - l'idée selon laquelle les croyances, les cultures, etc. n'ont de sens que par rapport à un contexte "local" et ne peuvent pas être comparées entre elles ; idée d'ailleurs très à la mode et que je rejette largement.

Cette dernière année, j'ai eu l'occasion d'ajouter six points supplémentaires à ma vision du monde : deux plutôt liés à la science (théorie de l'évolution et déterminisme), deux liés au fonctionnement de la société (peine de mort et revenue de base), un clairement philosophique (sens de la vie, etc.) et un lié à une activité que j'ai débuté il y a deux ans (méditation). J'ai également modifié (parfois très légèrement) cinq points existants. Enfin, et surtout, j'ai séparé mes différentes idées en cinq parties, en m'inspirant d'une classification mentionnée et adaptée par mon frère :
  • Explication du monde ("Quelle est la nature de notre univers ? Comment fonctionne-t-il ?")
  • Futurologie ("Vers quoi allons-nous ?")
  • Éthique ("Que devons-nous faire ? Comment devons-nous nous comporter ?")
  • Praxéologie / théorie de l'action ("Comment pouvons-nous atteindre nos buts ?")
  • Épistémologie / théorie de la connaissance ("Comment pouvons-nous distinguer le vrai du faux ?")
Ma vision du monde est encore bien incomplète. Il y manque de nombreux thèmes (droits des hommes, politique, économie, etc.) et je suis conscient que mes idées gagneraient à être éclairées par des connaissances philosophiques, scientifiques, historiques, etc. un peu plus approfondies et rigoureuses. Mais j'y travaille. Autant que possible, je me sers de mes lectures (livres et articles) pour illustrer ou enrichir mes idées. Car nous sommes ce que nous lisons, comme le rappelait Paul Graham dans un essai récent.

Explication du monde ("Quelle est la nature de notre univers ? Comment fonctionne-t-il ?")

Il existe une réalité matérielle objective, unique, dans laquelle nous existons et avons nos expériences subjectives.
J'adhère donc à un point de vue réaliste et matérialiste (ou, pour être un peu plus précis, physicaliste et moniste). J'adhère également et en particulier à la position que Paul Thagard appelle le réalisme constructif. Ce point de vue détermine à lui seul toute une série de concepts en lesquels je ne crois pas, car, de manière générale, pour moi, il n'existe rien en dehors de cette réalité matérielle dont il est question. Je ne crois par exemple pas en Dieu (athéisme). De même, je ne crois pas en l'existence de l'âme (absence de dualisme) ; je crois que la conscience est une propriété émergente de notre cerveau (ce qui, en soi, n'explique rien et demeure, pour l'instant, un "mystère"). Je ne crois toutefois pas forcément que l'être humain pourra un jour comprendre l'entier de la réalité dans laquelle il évolue. En tout cas pas en se contentant de son seul cerveau. Je pense en effet que les ordinateurs et l'intelligence artificielle joueront un rôle fondamental dans la compréhension de l'univers.
L'univers dans lequel nous vivons est déterministe.
Le déterminisme auquel je fais référence peut être défini comme suit : "Système d’après lequel les phénomènes de la nature sont fatalement produits par un enchaînement nécessaire d’antécédents et de conséquents, de causes et d’effets" (deuxième définition donnée par Wiktionnaire). Comme le mentionne Wikipedia, le déterminisme n'est pas la même chose que le fatalisme. Il ne doit pas non plus être confondu avec le concept, scientifique, de prédictibilité ou celui, plus ou moins religieux, de prédéterminisme. Le déterminisme tel que je le conçois est complètement compatible avec la physique quantique. Dans le contexte de la violation des inégalités de Bell, je tendrais donc plutôt à conserver la causalité et à rejeter le principe de localité ou le réalisme. J'accepte ainsi volontiers l'interprétation de Bohm de la mécanique quantique, bien éloignée d'une interprétation naïve et classique du déterminisme, telle que celle du démon de Laplace. Cette interprétation de la physique quantique est souvent négligée, mais revient au goût du jour. Il s'agit évidemment de concepts relativement compliqués, que je suis loin de comprendre complètement, donc j'ajouterais que ma position n'est pas très tranchée. Je pourrais même aller jusqu'à dire que je suis théoriquement agnostique concernant le déterminisme de notre univers (comme Massimo Pigliucci), mais déterministe en pratique. Peut-être qu'une manière plus exacte de décrire ma position serait de parler de déterminisme adéquat.
Le libre arbitre est une illusion.
Comme mentionné précédemment, nous vivons dans un monde déterministe, c'est-à-dire gouverné par la nécessité. Le futur ne dépend que de l'état actuel de l'univers et des lois qui le régissent. Au moment de faire un choix, nous avons l'impression d'être complètement libres et de pouvoir "changer" le futur, mais nos cerveaux, nos consciences, font en réalité partie intégrante d'une séquence/chaîne d'événements complètement nécessaires qui remontent jusqu'au début de l'univers. Rien ne contredit ce déterminisme plus logique que physique. Ni la physique quantique, ni l'existence d'univers parallèles, ni même l'existence ou non de l'âme. En réalité, il existe deux grandes classes de libre arbitre : le "libertarianisme" métaphysique et le compatibilisme. La première revient plus ou moins à avoir une position dualiste concernant l'esprit, ce que j'exclus (existence de l'âme). La seconde revient à "changer de sujet", comme l'exprime Sam Harris dans Free Will. Cela revient un peu à prendre une position panthéiste et déclarer que Dieu existe. Ce qui mène à la position erronée, par exemple, qu'Einstein n'était pas athée (ou tout du moins agnostique), mais croyant. Au final, cela revient donc à jouer avec les mots.
La majorité des médecines alternatives ne "marchent" pas.
Cela inclut en particulier l'homéopathie et l'acupuncture, mes "cibles" favorites, mais il existe des centaines de médecines alternatives, la plupart très farfelues et dénuées de tout fondement scientifique. Evidemment, il faut déjà s'entendre sur le sens du verbe "marcher", dans ce contexte, et cela pose une première difficulté. En effet, je pense que la plupart des gens qui pensent que les médecines alternatives fonctionnent sont victimes d'une erreur de raisonnement type cum hoc ergo propter hoc. Autrement dit, ils prennent une corrélation pour un lien de cause à effet, alors qu'avec ou sans traitement, les symptômes qu'ils cherchent à "traiter" disparaîtraient très probablement tout seuls (le corps agissant naturellement sans aide extérieure). Un autre phénomène donnant l'illusion que les médecines alternatives marchent, à mon avis très surestimé, est l'effet placebo. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, l'effet placebo n'agit réellement que sur quelques symptômes très limités (douleur, anxiété, dépression, etc.). L'effet placebo n'est en réalité que l'expression des espoirs que place un patient dans son traitement (ou de ses craintes, d'ailleurs). Il s'agit d'un effet superficiel. Au mieux, il fait oublier au patient ses "petits bobos". Au pire, il peut cacher des problèmes plus graves. Car il ne faut pas oublier que les médecines alternatives peuvent être dangereuses, voire tuer, par la confusion qu'elles engendrent dans un domaine, celui de la santé, qui n'a définitivement pas besoin de plus de complexité et d'idées erronées. Ben Goldacre, à qui j'aime bien me référer lorsque l'on parle de santé, explique bien dans son livre Bad Science que l'on peut parfaitement critiquer la mauvaise science (qui inclut les médecines alternatives) tout en critiquant également le système de santé classique et, en particulier, l'industrie pharmaceutique, à laquelle on peut reprocher pas mal de choses. Cela n'enlève en rien les mérites d'une médecine fondée sur les faits et non sur les superstitions et la paresse intellectuelle.
La théorie de l'évolution par la sélection naturelle est la meilleure explication du développement de la vie sur Terre.
Plus exactement, de nos jours, il faut plutôt parler de théorie synthétique de l'évolution (ou néodarwinisme). La théorie de l'évolution est un sujet difficile d'accès. Comme le disait Jacques Monod : "Another curious aspect of the theory of evolution is that everybody thinks he understands it!" La réalité est que peu de monde comprend vraiment la théorie de l'évolution. Il m'a fallu travailler durant des mois sur un projet de recherche, à l'EPFL, mettant en lien algorithmes génétiques et réseaux de neurones artificiels, pour commencer à comprendre, intuitivement, que de la "non-intelligence" puisse engendrer de l'"intelligence", que quelque chose donnant l'impression d'avoir été réfléchi, conçu par un être intelligent, puisse n'être que le fruit d'un long processus "aveugle", basé sur des règles simples. Naturellement, la théorie de l'évolution est donc un thème qui tend à polariser les opinions. De nombreuses personnes n'acceptent pas cette théorie, souvent pour des raisons religieuses, parce qu'elle entre en conflit avec le point de vue anthropocentrique que la plupart des gens ont naturellement (l'homme est important, car il a été créé par Dieu). Il est par conséquent important de s'efforcer de la vulgariser, comme l'a par exemple brillamment fait Richard Dawkins dans The Selfish Gene. Enfin, il me semble que la théorie de l'évolution a ceci d'élégant qu'elle semble pointer vers l'existence d'une loi plus fondamentale, plus générale, pouvant s'appliquer à d'autres domaines, tels que la chimie ou la physique. Un peu comme la loi des retours accélérés de Ray Kurzweil généralise la loi de Moore, en mettant en évidence une tendance plus générale, plus universelle.

Futurologie ("Vers quoi allons-nous ?")

L'être humain produira une intelligence artificielle égale, puis supérieure à la sienne dans la première moitié du vingt et unième siècle.
Je crois que cet événement produira alors une "explosion d'intelligence" ou singularité technologique, telle que décrite par Vernor Vinge, Ray Kurzweil et bien d'autres. Je me situe plutôt du côté connexionisme du débat computationnalisme vs connexionisme, mais je suis loin d'être convaincu que ces deux points de vue sont nécessairement incompatibles. J'ai tendance à croire qu'une intelligence artificielle forte est possible, mais le lien entre intelligence et conscience n'est pour moi ni clair ni automatique, à savoir qu'elles ne sont selon moi par forcément corrélées : il peut y avoir intelligence sans conscience et, peut-être, conscience sans intelligence. De même, le concept de mind uploading reste pour moi quelque chose de très probable, mais, à nouveau, confus. Je n'ai pas encore fait le tour des paradoxes apparents que ces idées entraînent. Enfin, je pense que pour créer une intelligence artificielle équivalente à celle des humains, il est utile de suivre une approche mixte, d'une part en essayant de simuler le cerveau humain de la manière la plus détaillée possible (projets Human Brain Project et BRAIN Initiative) et, d'autre part, en affinant les méthodes issues du domaine de l'intelligence artificielle (réseaux de neurones artificiels, deep learning, etc.).
La mise en place d'un revenu de base est indispensable, à terme, et ce dans tous les pays.
Note : par "revenu de base" (ou "universel", "inconditionnel", etc.), j'entends : "un revenu versé par une communauté politique à tous ses membres, sur une base individuelle, sans conditions de ressources ni obligation de travail". Ce point de vue n'est pas la conséquence d'une idéologie politique ou philosophique, mais la conclusion logique de l'automatisation inévitable de toutes les tâches humaines, qu'elles soient manuelles ou intellectuelles, suite au développement d'une intelligence artificielle égale, puis supérieure à celle de l'être humain (voir le concept de singularité technologique). Toutes choses étant égales par ailleurs, la conséquence pratique de cette évolution est une augmentation du chômage. Un exemple à la mode est celui des voitures autonomes (dont celle de Google, la plus médiatisée), qui ont le potentiel de mettre au chômage des millions de conducteurs de taxi, de camion, de bus, etc. (sans parler des conducteurs de trains et de métros, dont la disparition a déjà commencé). Mais ça n'est qu'un exemple parmi beaucoup d'autres : de nombreuses professions sont menacées, dans un avenir plus ou moins proche. Une idée répandue est que pour une profession supprimée (ex. les copistes) par une évolution technologique (p. ex. l'imprimerie), plusieurs autres professions voient nécessairement le jour. Historiquement, cela s'est vérifié à de maintes reprises, mais les progrès dans le domaine de l'intelligence artificielle, de la robotique, etc. vont de plus en plus changer la donne. A terme, tous les métiers, courants ou à venir, sont "en danger". J'utilise ici volontairement un terme négatif, mais il s'agit de changer notre manière de voir le travail. Traditionnellement, le fait de travailler est vu comme étant positif et le fait de dépendre d'assurances sociales, comme étant négatif, mais le travail n'est évidemment pas un but en soi. Il n'y a pas de raison que nous travaillions autant. La technologie est censée nous rendre plus productifs et, idéalement, nous permettre d'avoir plus de temps à disposition pour faire ce que nous souhaitons vraiment faire de nos vies (se consacrer à l'art, à la philosophie, à la science, à la spiritualité, au sport, etc.). Dans la pratique, cela n'a malheureusement pas été le cas jusqu'à présent (voir "Who Stole the Four-Hour Workday?"). Pire, tout un sous-ensemble de la population prétend travailler, sans réellement travailler (voir "The Art of Not Working at Work" et "On the phenomenon of bullshit jobs"). Reste à estimer l'échelle de temps dont on parle. Ray Kurzweil place la singularité technologique en 2045. On ne parle donc pas d'un changement radical dans quelques millénaires ou siècles, mais dans à peine quelques décennies.

Éthique ("Que devons-nous faire ? Comment devons-nous nous comporter ?")

Le but de tout système moral devrait être d'augmenter le bien-être et diminuer la souffrance des êtres conscients.
Autrement dit, un système moral doit reposer à la base sur le concept de conscience. J'adhère ici principalement aux idées de Bertrand Russell (voir son essai What I Believe et le concept de good life, prônant compassion et raison) et de Sam Harris (voir son livre The Moral Landscape, mais aussi son "Moral Landscape Challenge", qui résume bien sa position). Ces idées sont également résumées succinctement par Daniel Miessler dans son profil. Ma position par rapport à la morale est une position utilitariste et donc conséquentialiste. Les principes de base de cette position (augmenter le bien-être, diminuer la souffrance) sont relativement simples à énoncer, mais ils peuvent être complexes à appliquer dans la pratique. La détermination du bien-être d'un individu est un sujet déjà épineux. Parle-t-on du bien-être "instantané" ou à long terme ? Une personne est-elle capable de déterminer aisément son propre bien-être ? Si on en croit le livre Stumbling on Happiness de Daniel Gilbert, c'est loin d'être le cas. Et si le cas d'un seul individu est déjà problématique, celui d'un groupe d'individus l'est encore plus. Comment concilier le bien-être de deux individus ? De mille individus ? De sept milliards d'individus ? Ce sont des questions difficiles. Ce qui est certain, toutefois, c'est que bien-être et souffrance prennent leur racine dans le cerveau et que, par conséquent, seule une approche rationnelle et scientifiques peuvent éclairer la morale. De là, je rejette tout système moral purement déontologique et, en particulier, religieux (donc basé sur des divinités inexistantes et des superstitions). Il faut encore noter que, comme l'explique Sam Harris, les éthiques de la vertu et déontologique sont implicitement conséquentialistes.
La vie des êtres humains, en particulier, et des animaux disposant d'un système nerveux, en général, doit être préservée autant que faire se peut.
Note : j'utilise ici le terme "animal" dans son sens biologique, le règne animal comprenant donc les êtres humains. Mon raisonnement prend pour point de départ l'approche d'Albert Camus, présentée dans Le Mythe de Sisyphe. Dans un monde absurde (sans Dieu, sans âme, sans vie éternelle, sans libre arbitre, où les choses n'ont pas de sens intrinsèque, où les gènes survivent mais les individus meurent, etc.), il y a trois voies possibles : le suicide (physique), le suicide philosophique (i.e. la religion) et la révolte. Comme Camus, j'opte pour la révolte. Ce rejet du suicide revient à déclarer que la vie a une valeur, qu'elle vaut la peine d'être vécue. Mais une fois cette "révolte" déclarée, où placer la frontière entre les vies qui ont une valeur et celles qui n'en ont pas ou qui n'en ont qu'indirectement ? La notion selon laquelle il est difficile de donner un sens à sa vie sans en accorder à celle des autres me semble fondamentale (voir "The Importance of the Afterlife. Seriously."). Mais je n'arrive pas à concevoir qu'on puisse limiter ce raisonnement aux êtres humains seuls. Il doit y avoir un critère plus général. L'utilité effective ou potentielle d'un individu pour la société ? Je ne crois pas. Cela justifierait l'euthanasie à tout-va (des personnes mentalement handicapées, etc.). Non, il y a un autre critère déterminant, plus "élégant" selon moi : la conscience. Or, jusqu'à preuve du contraire, l'existence d'un système nerveux est une condition nécessaire, en tout cas dans la nature, à l'existence de la conscience, sans laquelle il ne peut y avoir ni bien-être ni souffrance. Il découle de cette approche que je n'accorde pas de valeur particulière à la vie des végétaux ou des animaux sans système nerveux (éponges, etc.), en dehors de l'impact que ces vies peuvent avoir sur celles des animaux sentients dont nous faisons partie.
Il est immoral de tuer des animaux pour les manger ou, plus généralement, de les exploiter pour notre plaisir.
Cette position est en quelque sorte un corollaire de ma position sur la valeur de la vie humaine et de celle des animaux disposant d'un système nerveux. Les questions morales ne peuvent s'arrêter aux êtres humains seuls et doivent s'appliquer à tous les êtres doués de conscience. De là découle le fait que je suis végétarien depuis 1997 et que je réfléchis régulièrement à des moyens de diminuer ma consommation de produits animaux (lait, oeufs, etc.), dont la production est également liée à des maltraitances ou des mises à mort. Mon végétarisme me définit profondément et j'aurais de la peine à m'imaginer consommer à nouveau de la chaire animale à l'avenir. J'ai toutefois de la peine à être aussi "militant" dans ce domaine que dans d'autres qui me tiennent aussi à coeur (athéisme, défense de la raison et de la science, etc.), en grande partie parce qu'il s'agit d'une position morale, relativement subtile (elle nécessite de reconnaître l'existence d'une conscience chez les animaux, par exemple) et, donc, plus difficile à expliquer. Selon moi, l'argument moral est d'ailleurs voué à l'échec. Des arguments plus pragmatiques pourraient être mis en avant, mais ils ont tous leurs faiblesses : l'impact environnemental de la viande (mais la consommation de viande est un peu "noyée dans la masse", par rapport aux sujets généralement traités par les médias, comme le pétrole, le nucléaire, le recyclage, les transports publics, etc.), le coût relativement élevé de la viande (mais l'agriculture locale, biologique et/ou équitable n'est pas bon marché non plus), la santé (mais je suis loin d'être persuadé que le végétarisme à lui seul est fondamentalement meilleur pour la santé), etc. Je suis donc de plus en plus convaincu que la véritable solution à ce problème moral est la viande artificielle (ainsi que, plus généralement, le cuir artificiel, le lait artificiel, les oeufs artificiels, etc. - et j'entends par là des reproductions aussi fidèles que possible, chimiquement, des produits de base, pas de substituts à base de soja, tofu, légumes ou autres).
La peine de mort n'a pas sa place dans un système judiciaire moderne.
Note : lorsqu'on parle de peine de mort, on pense souvent aux Etats-Unis, mais elle est encore appliquée dans plusieurs dizaines de pays à travers le monde. Le contexte premier de cette réflexion est que la société devrait accorder, autant que possible, une importance primordiale à la vie des êtres humains (et des êtres conscients en général). La justice devrait donc être constructive (p. ex. réinsertion) plutôt que destructive, punitive. Selon ces principes, la mort donnée volontairement peut être considérée comme un aveu d'échec, une solution de facilité. Au delà de ces généralités, il y a des problèmes pratiques. Celui des erreurs judiciaires, en premier lieu. Evidemment, même dans le cas d'un emprisonnement à perpétuité, une erreur judiciaire est quelque chose d'effroyable, mais la peine de mort, une fois appliquée, ne permet par définition aucun retour en arrière, aucun dédommagement. Il y a le problème des exécutions ratées, qui font régulièrement parler d'elles, aux Etats-Unis en particulier. Le personnel soignant et l'industrie pharmaceutique n'ont pas envie de participer aux mises à mort, qui peuvent ainsi tourner à la torture, faute de moyens sérieux. Il semblerait également que la peine de mort ne soit pas particulièrement plus dissuasive que la prison à vie. Reste donc l'argument économique, la prison à vie coûtant cher. Mais une exécution est aussi très coûteuse et il est possible de "rentabiliser" un détenu en le faisant travailler, ce qui a aussi l'avantage de permettre d'estimer sa capacité à être réinséré dans la société. Enfin, il ne faut pas oublier que la peine de mort n'affecte pas seulement le condamné à mort, mais aussi son entourage, sa famille.

Praxéologie / théorie de l'action ("Comment pouvons-nous atteindre nos buts ?")

Il est nécessaire et utile de débattre et de remettre en question ce que pensent/croient les gens.
Le discours selon lequel les gens doivent pouvoir penser "ce qu'ils veulent" et qu'il faut respecter a priori ce que pensent ou croient les gens est très répandu. Ma position n'est pas qu'il faut "interdire" aux gens de penser ce qu'ils pensent, mais qu'il est indispensable de soumettre toute idée à l'esprit critique, y compris (et surtout) les idées politiques ou religieuses. Il faut également distinguer le respect que l'on porte à une personne et celui que l'on porte à une idée : il est parfaitement possible de respecter une personne tout en étant en désaccord total avec elle sur une opinion. Enfin, l'idée selon laquelle ce que les gens pensent/croient importe peu est selon moi erronée. Elle aurait peut-être un certain mérite si nous vivions tous complètement isolés, mais la réalité est que nous vivons en société, que les idées circulent de plus en plus facilement (grâce, essentiellement, à internet) et que ces idées ont bel et bien un effet réel sur les gens (démocratie, droit de vote, etc.). Il n'y a donc non seulement rien d'intégriste à critiquer les superstitions ou les croyances les plus personnelles des gens, mais c'est un processus essentiel pour que nos sociétés progressent.
La philosophie est nécessaire et utile.
La philosophie a un rôle à jouer dans notre quête de compréhension de la réalité dans laquelle nous vivons, mais c'est un rôle plus spéculatif, plus exploratoire, encore moins définitif que celui de la science. Comme le résume Daniel Miessler, en simplifiant les choses presque à l'extrême, la philosophie permet de déterminer la nature de la réalité en y réfléchissant et la science, en la testant. Bien des thèmes (morale, libre arbitre, conscience, effet placebo, etc.) ne peuvent pour l'instant pas être totalement abordés en utilisant nos seules connaissances scientifiques. Il y a donc une complémentarité entre ces deux moyens d'accéder à la connaissance, mais la limite entre les deux est floue. Je rejoins ici Sam Harris : "il n'y a pas de frontière claire entre la (bonne) philosophie et la science" ("There is no clear line between (good) philosophy and science."). Car, comme il y a une "bonne" et une "mauvaise" science, il y a aussi une "bonne" et une "mauvaise" philosophie, que dénonce Paul Graham : la "mauvaise" philosophie serait celle qui se laisserait prendre au piège de la définition des mots, à celui des idées vagues et confuses mais provoquant néanmoins une certaine fascination. Je citerai encore Bertrand Russell, pour qui, "aussitôt qu'une connaissance certaine concernant un sujet devient possible, ce sujet cesse d'être appelé philosophie et devient une science à part" ("as soon as definite knowledge concerning any subject becomes possible, this subject ceases to be called philosophy, and becomes a separate science"), ainsi que Sam Harris : "Les idées importent - et la philosophie est l'art d'y penser rigoureusement" ("Ideas matter—and philosophy is the art of thinking about them rigorously").
L'art est nécessaire et utile.
J'ai une définition très large de ce qu'est l'art : moyen d'explorer ce qu'est le réel ou ce qu'il n'est justement pas, porteur d'un message clair ou, au contraire, ambigu, voire vide de sens, moyen d'atteindre la beauté ou d'évoquer en nous les sentiments les plus négatifs, rendant notre quotidien plus facile à vivre ou hantant nos nuits ; ce qui me semble certain, c'est que, comme la philosophie a un rôle complémentaire, spéculatif, par rapport à la science, l'art a un rôle également complémentaire par rapport à la pensée rationnelle. Pour moi, l'art joue le rôle de défouloir : il est le (seul) domaine où l'irrationnel peut encore s'exprimer librement, sans que cela ne porte à conséquence. En ce sens, l'art est absolument essentiel. Comme Steven Pinker, je pense que la science peut aussi influencer positivement l'art. D'ailleurs, à terme, l'intelligence artificielle mènera forcément à ce que l'on pourrait appeler "l'art artificiel". La limite entre art et science deviendra alors difficile à définir.
La pratique de la méditation est un moyen d'apprendre sur soi-même et de développer certaines qualités humaines.
Longtemps, j'ai considéré la méditation comme la version laïque de la pratique religieuse de la prière, mais c'est une manière simpliste et finalement fausse de voir les choses. D'une part, la méditation prend bien ses sources dans la religion (bouddhisme, hindouisme, jaïnisme, etc.). Certaines pratiques méditatives sont par conséquent bien liées à des éléments mystiques, surnaturels et, donc, antiscientifiques. D'autre part, la pratique de la méditation va, à mon sens, bien au-delà de la pratique de la prière, dont le but est principalement l'expression d'une requête, d'un sentiment de gratitude ou d'une confession à une divinité. La méditation, quant à elle, est avant tout une recherche, un questionnement, une attitude de curiosité envers sa propre conscience et la façon dont nous interragissons avec les autres. Comme des programmes tels que Headspace le montrent bien, il est possible de pratiquer la méditation de manière totalement séparée des religions dont elle est issue. La science semble même valider certains bienfaits de la méditation. De manière plus anecdotique, j'ajouterai que la méditation apprend à maîtriser ses émotions (négatives, mais pas seulement), à développer son empathie, à apprendre la patience, etc. Enfin, encore plus intéressant, la méditation peut être, selon Sam Harris, un outil d'exploration philosophique permettant de mieux comprendre la nature de notre conscience et de ce que l'on appelle communément "identité" (une illusion, selon Harris).

Épistémologie / théorie de la connaissance ("Comment pouvons-nous distinguer le vrai du faux ?")

La raison, l'esprit critique et la méthode scientifique sont les meilleurs outils intellectuels que nous ayons à disposition pour expliquer la réalité et étendre notre connaissance de celle-ci.
Cette position n'est pas la même qu'un scientisme pur, selon lequel seule la science aurait son mot à dire et ce dans tous les domaines. La philosophie et l'art ont aussi leur rôle à jouer, par exemple (voir plus loin). Il faut également distinguer l'esprit scientifique comme idéal à atteindre et la science dans la pratique, par exemple dans le milieu académique ou dans l'industrie (pharmaceutique, en particulier), avec tous leurs enjeux politico-économiques. A ce sujet, Ben Goldacre explique à merveille en quoi consiste la "bonne" et la "mauvaise" science. Enfin, je crois que la science a un potentiel explicatif fantastique, loin d'être atteint à l'heure actuelle. Cela ne m'étonnerait pas qu'à l'avenir, certains domaines qui ne peuvent pour l'instant qu'être "éclairés" par la science (la politique, l'éthique, l'art, etc.) se retrouvent modélisés de manière bien plus complète par la science. En ce sens, je me rapproche peut-être tout de même d'une certaine position scientiste - qui n'aurait dans ce cas aucun sens péjoratif à mes yeux, de toute évidence.
Aucune explication objective du phénomène de la conscience ne peut être totalement "satisfaisante".
Les concepts de conscience et d'intelligence sont proches. Ce sont tous les deux des concepts "flous", qui échappent à une définition totalement convaincante. Toutefois, l'intelligence échappe moins à l'analyse rationnelle. Le domaine de l'intelligence artificielle avance lentement, mais sûrement, depuis plus de cinquante ans et il est possible de se mettre d'accord sur des conditions de test pour déterminer si une intelligence artificielle est "réellement" intelligente ou non (test de Turing ou autres tests similaires). La conscience, elle, semble pour le moment échapper à toute analyse directe. Il n'existe pas de "test de conscience" qui déterminerait si une "conscience artificielle" est vraiment consciente ou non. C'est un phénomène subjectif, qu'on peut tout au plus tenter de mettre en corrélation avec des observations objectives. C'est la partie "facile" du problème de la conscience. Il reste la partie "difficile" : comment des phénomènes que l'on peut observer objectivement, dans le cerveau, donnent lieu à l'expérience subjective que j'appelle "conscience" ? Suis-je le seul à vivre cette expérience ? Tous les gens autour de moi sont-ils des zombies philosophiques ? C'est le problème des autres esprits. Beaucoup de gens se sont exprimés sur le sujet. Daniel Dennet et Massimo Pigliucci semblent penser que le problème difficile de la conscience n'en est pas un, qu'il s'agit, pour Pigliucci du moins, d'une erreur de catégorie. Pour Christof Koch, qui a longtemps travaillé avec Francis Crick, il faudrait plutôt pencher vers une sorte de panpsychisme sophistiqué. On peut encore mentionner Roger Penrose et Stuart Hameroff, avec leur théorie des microtubules. Je ne suis pas familier avec le point de vue de Hameroff, mais Penrose semble avoir cédé à la tentation du mysticisme quantique (la physique quantique semblant suffisamment "magique" pour expliquer un phénomène tel que la conscience). Au final, ce que je prétends, c'est que le cerveau humain est incapable de comprendre de manière intuitive (donc satisfaisante) le lien entre des observations objectives et le phénomène subjectif qu'est la conscience. Par contre, je suis prêt à parier que le problème difficile de la conscience a bien une réponse. Ou n'est pas un problème. En ce sens, je ne rejoins pas la position de Colin McGinn ("his answer to the hard problem of consciousness is that the answer is inaccessible to us").
Rien n'a de sens "en soi". En particulier, la vie n'a pas de sens intrinsèque.
Ma position n'est pas un nihilisme au sens le plus absolu et le plus large du terme, mais plutôt un nihilisme existentiel. Elle correspond largement au constat de base d'Albert Camus, à savoir que la vie est absurde (l'homme ne peut s'empêcher de chercher un sens à la vie, mais n'en trouve pas ou difficilement ; chaque jour est pour lui un nouvel espoir, mais le rapproche en même temps de la mort). Il s'agit donc d'un point de départ et non d'une conclusion. Si la vie n'a pas de sens "en soi", a priori, intrinsèque, je reconnais toutefois qu'on peut lui attribuer un sens extrinsèque. C'est l'une des idées véhiculées par l'existentialisme, mais l'absurde de Camus va légèrement plus loin, appelant à accepter, sans jamais la nier, cette absence de sens fondamentale. Cette position est pour moi indirectement liée à mon athéisme (i.e. absence de Dieu créateur, de vie éternelle, etc. - la croyance en ces concepts constituant ce que Camus nommait le "suicide philosophique") et mon matérialisme (i.e. l'esprit humain est le résultat de l'activité du cerveau, c'est-à-dire de 86 milliards de neurones, dont la fonction principale, modelée par l'évolution et à laquelle il ne peut échapper est de faire du "pattern matching", à savoir trouver du sens dans une grande quantité de données - sons, images, mots, concepts, etc.). La révolte à laquelle Camus appelle prend pour moi diverses formes, par exemple celle de la méditation, qui est un moyen de contempler et accepter notre condition.

Saturday, November 22, 2014

La burka est un vêtement comme les autres

"La burka est un vêtement comme les autres". Ce n'est pas mon opinion, mais celle, plutôt étonnante, de quelqu'un avec qui je débattais récemment sur Twitter. Il s'agit d'une personne de gauche, politiquement, donc a priori convaincue par la nécessité de se battre pour le droit des femmes. Comment en est-il alors arrivé à une telle conclusion ? Par provocation ? Possible, mais j'en doute. Non, à moins que quelque chose m'ait échappé, je pense que cette personne serait étonnée, voire choquée, si une femme habillée en burka venait s'asseoir à côté de lui dans un bar, en Suisse, mais, craignant qu'on le taxe de xénophobie ou d'intolérance, il s'est rangé à cette position logiquement indéfendable. Bel exemple de relativisme culturel...

Ce genre de discours est de plus en plus courant. Récemment, nous avons eu droit à un exemple très commenté, aux Etats-Unis, avec Sam Harris et Bill Maher, d'un côté, et Ben Affleck, essentiellement, de l'autre. Il était question de l'État islamique, en particulier, et de l'islam, en général. Ben Affleck, pourtant démocrate, a démontré son incapacité totale à tenir un discours calme, cohérent et nuancé sur la question. Son intervention a malgré tout été accueillie positivement par de nombreuses personnes.

Le problème est que dans le "monde occidental", la majeure partie du discours négatif à l'encontre de l'islam est tenu par des partis très conservateurs, typiquement les partis les plus à droite du spectre politique. En Suisse, c'est l'UDC et ses partisans qui tiennent à nous rappeler, régulièrement, que l'islam est un danger pour notre "culture judéo-chrétienne". L'initiative "Contre la construction de minarets" est un exemple de ce dont ce parti est capable. Or, aucune personne au centre ou à gauche du spectre politique ne tient à être assimilé à l'extrême-droite, ce qui est compréhensible, mais ce qui fausse aussi le débat.

Car l'islam doit être critiqué. En évitant les amalgames, les généralisations simplistes et le rejet, bien entendu. Concernant la burka, l'interdiction est ou n'est pas la solution, je ne le sais pas. Mais ça n'est pas en partant de l'idée absurde que la burka est anodine qu'un débat constructif aura lieu. Elevons le débat, même s'il est très complexe, même s'il se doit d'être subtil, mais ne succombons pas au politiquement correct, au relativisme culturel, à la tolérance à tout prix et à cet anti-intellectualisme qui semble tellement à la mode.

Tuesday, November 4, 2014

Vivre à l'hôtel et le minimalisme

Il y a quelques mois, je décrivais mon attrait pour le minimalisme (ou simplicité volontaire). Depuis plus d'une semaine maintenant, suite à un gros retard dans la construction de notre nouvel appartement, nous habitons dans une chambre d'hôtel (payée par notre architecte, mais j'y reviendrai). Aux dernières nouvelles, il apparaît que nous devrons y passer dix-neuf jours en tout cas. Avant cet épisode, nous avions déjà passé deux semaines chez nos parents. On peut donc dire que, malgré moi, je suis en train de vivre une expérience de minimalisme encore plus poussé que prévu. Une sorte de simplicité involontaire, en quelque sorte.

Ce qui me fait penser au minimalisme dans notre situation actuelle n'est pas tellement le fait de vivre dans un hôtel, dont les impacts écologiques ne sont, j'imagine, pas optimaux, mais plus le fait que nous vivons dans une seule pièce (le soir, essentiellement) avec plus de 90% de nos affaires stockées dans un garde-meuble et, cela, en dehors d'un contexte de vacances (nous travaillons tous les deux).

Parmi les principaux problèmes que nous rencontrons pour l'instant, il y a les repas du soir (manger au restaurant de l'hôtel chaque soir est un peu répétitif et nous n'avons pas toujours le temps ou l'énergie d'aller ailleurs après une journée de travail) et la lessive (mais nous avons pu trouver un arrangement avantageux avec la blanchisserie de l'hôtel).

Après un peu plus d'une semaine seulement, il est encore trop tôt pour tirer des conclusions définitives, mais je dois avouer que mes possessions, que je n'ai pas vues depuis plus de trois semaines maintenant, ne me manquent pas. Evidemment, les quelques objets que j'ai conservés avec moi durant cette aventure (laptop, smartphone, Kindle, etc.), ainsi que l'existence d'une connexion internet fiable dans notre hôtel, ne sont pas étrangers à ce constat plutôt positif !

Mise à jour (30 novembre 2014). Après cinq semaines d'hôtel (et ça n'est pas fini...), je peux confirmer que les repas du soir, ainsi que ceux du matin, sont devenus répétitifs. Le phénomène est amplifié par le fait que je suis végétarien et que le restaurant de l'hôtel propose peu de plats sans viande ni poisson ou qui peuvent facilement être adaptés. Les produits végétaliens auxquels je suis habitué (lait de soja, yaourt de soja, Vegusto, etc.) me manquent également un peu (pas de frigo pour les conserver dans la chambre). Il nous est arrivé à une ou deux occasions d'avoir besoin d'un objet personnel stocké au garde-meuble, mais rien de dramatique pour l'instant.

Tuesday, October 21, 2014

Waking Up

J'ai récemment terminé de lire Waking Up: A Guide to Spirituality Without Religion de Sam Harris. En général, après la lecture d'un livre, je sais à quoi m'en tenir : je suis enthousiaste, déçu ou indifférent. Cette fois-ci, je suis plutôt perplexe.

Comme d'habitude, c'est très bien écrit et c'est l'une des qualités que j'apprécie chez Harris. On sent une réflexion importante derrière son écriture, mais cela ne se traduit pas par un style opaque ou complexe, ce qui rend la lecture de ses livres et de ses articles particulièrement agréable.

La première surprise à la lecture de ce livre est le nombre de sujets déjà abordés, parfois longuement, sur le blog de Harris : le "mystère" de la conscience, la méditation, les expériences de mort imminente (EMI), les drogues, etc. On a parfois plus l'impression de lire un recueil d'anciens articles que de véritablement lire un livre qui vient de sortir.

Au-delà de cet aspect redite et d'une certaine structure un peu décousue, il faut bien admettre que de nombreux sujets abordés dans cet ouvrage sont fascinants. Un chapitre entier est consacré à la conscience et à la difficulté qu'ont les scientifiques et les philosophes à la définir et à l'expliquer. Poussant le constat plus loin, Harris rejoint, partiellement du moins, Colin McGinn et Steven Pinker sur l'idée qu'il se pourrait que la conscience n'accepte pas d'explication "intuitive", qu'elle soit tout simplement incompréhensible, un point sur lequel je les rejoins également. Le passage sur les patients souffrant du syndrome de déconnexion interhémisphérique (split brain syndrome) est à la fois perturbant et éclairant.

Un des autres points forts du livre est la façon dont Harris parvient à séparer, systématiquement et avec un niveau de nuances au-dessus de beaucoup de ses pairs, le bon du mauvais dans les pratiques religieuses. Il le fait dès l'introduction, pour le bouddhisme, et y revient plus loin en parlant des gourous, dont ceux qu'il a été amené à rencontrer. C'est un questionnement récurrent chez les athées : quels éléments positifs les religions contiennent-elles et comment peut-on les vivre/pratiquer en dehors de toute religion (i.e. de manière laïque) ? C'est aussi et évidemment le thème général de ce livre (la spiritualité sans religion).

Enfin, pour revenir à quelque chose de plus frustrant, il faut souligner la manière dont Harris développe le thème de la méditation. Dans un chapitre entier, il passe en revue les différents types, enseignements et lieux de méditation, faisant appel régulièrement à des anecdotes. La conclusion, je crois, est que certains enseignements sont meilleurs que d'autres (le Dzogchen, en particulier), mais qu'il faut aller au Tibet ou en Inde pour trouver un gourou plus ou moins capable d'expliquer ce qu'il a appris durant des dizaines d'années de pratique de la méditation. Je caricature un peu, mais le moins qu'on puisse dire est qu'il s'agit d'un chapitre plus théorique et descriptif que pratique et pédagogique. Je médite depuis plus d'une année et demie (à l'aide de Headspace) et je n'ai rien trouvé directement dans cette partie du livre qui puisse vraiment m'aider à aller plus loin dans ma pratique.

Au final, Waking Up est un livre dont la lecture provoque plus de questions qu'elle n'apporte de réponses. Ce que nous appelons "identité", "moi", "je", etc. n'est pas un concept aussi clair qu'on pourrait le croire. La méditation, au-delà des méthodes relativement ludiques et faciles d'accès telles que Headspace, peut aussi être une pratique subtile nous permettant de constater cette réalité. Comment y parvenir ? C'est une des questions auxquelles je dois encore répondre. Idéalement sans aller au Tibet...

Sunday, June 29, 2014

Point lecture (premier semestre 2014)

Je me suis déjà exprimé sur la difficulté de la prise de notes lors de la lecture d'un livre. Rien n'a vraiment changé sur ce front. J'ai par contre décidé cette année de publier mes "notes Kindle" sur Github, sur mon repository "My public self", plutôt que sur mon blog (voir "Selected quotes from books I've read in 2011-2013" et "Selected quotes from A Universe from Nothing").

Github, bien qu'à la base destiné à contenir des projets de développement logiciel, me semble pour l'instant plus adapté à du contenu non rédigé, telles que mes listes de films vus, livres lus, etc. C'est aussi un endroit idéal pour les documents qui évoluent avec le temps, telle que ma vision du monde. Je n'exclus d'ailleurs pas à l'avenir de retravailler mes notes de lecture pour les compléter avec des commentaires personnels et les structurer un peu plus.

Je profite de ce court article pour faire un point sur mes lectures, puisque nous sommes déjà à la moitié de l'année. J'ai pour l'instant terminé de lire quatre livres seulement. Des lectures à nouveau sérieuses, pour ne pas changer. Je lis toujours Cosmos de Carl Sagan en "tâche de fond", essentiellement le soir. 

Si le contenu et les thématiques (science, philosophie, programmation, etc.) changent peu, ma manière d'aborder la lecture a légèrement évolué avec le temps. En début d'année, il m'est arrivé de lire jusqu'à trois livres en même temps : un premier livre dans les transports publics le matin, un deuxième livre en rentrant du travail et un troisième livre le soir à la maison. Une expérience à tenter à nouveau, sans doute.

Fin avril, j'ai commencé la lecture de La Peste de Camus, mais je me suis vite interrompu - durant deux mois ! - pour me consacrer à la lecture d'une liste d'articles, plus ou moins longs, que je n'arrivais pas à "dépiler".

Pour conclure, voici donc une sélection de certains de ces articles que j'ai lus ces dernières semaines et que je recommande (à nouveau, je dois reconnaître que les thèmes ne sont pas très variés - je vais faire un effort sur ce point) :
Mise à jour (14 avril 2015). Mes notes Kindle sont désormais disponibles sur olivier.bruchez.name.

Wednesday, June 25, 2014

Déménagement, dématérialisation et décroissance

C'est une année importante pour ma femme et moi : cet automne, nous emménagerons dans notre nouvel appartement, dont, cette fois-ci, nous serons propriétaires. Nous quitterons donc notre appartement actuel, que je loue depuis maintenant douze ans, depuis la fin de mes études. Plusieurs changements nous attendent, comme nous nous éloignons de la ville. Par exemple et malheureusement, les trajets en transports publics seront en grande partie remplacés par des déplacements en voiture. De manière plus anecdotique, je devrai abandonner mon rituel de lecture dans le métro, matin et soir, et trouver d'autres moments dans la journée pour lire. Et peut-être me mettre à l'écoute de podcasts.

Mais c'est aussi l'occasion de faire un point complet sur nos possessions physiques et, en même temps, de confirmer, ou accélérer, une tendance qui s'est précisée chez moi depuis une dizaine d'années : la volonté de posséder le moins de choses possible (une forme de minimalisme / simplicité volontaire moderne - minimalism / simple living, en anglais) :
  • Depuis 2005, je scanne tous les papiers que je reçois. Je ne conserve qu'une petite pile de papiers essentiels de quelques millimètres (contrats, etc.). Je n'ai jamais possédé d'imprimante depuis que je n'habite plus chez mes parents. J'essaie de recevoir le moins de courrier possible, en me désabonnant de tout ce qui est inutile et en apposant les autocollants nécessaires sur ma boîte aux lettres pour ne recevoir ni publicité ni journaux gratuits. Je reçois et paie mes factures en ligne, lorsque je le peux. En résumé, je tends à être paperless.
  • Depuis 2011, au début de chaque année, je me fixe plusieurs buts annuels quantifiables et, dès la première année, j'ai pris l'habitude de m'imposer de donner, vendre, recycler ou jeter un certain nombre d'objets par année. Au début, j'avais choisi le nombre symbolique d'un objet par mois (i.e. douze objets par année), mais je me suis rapidement aperçu qu'en me prenant au jeu, je pouvais largement dépasser ce but (26 objets en 2011, 28 objets en 2013 et j'en suis déjà à l'heure actuelle à 39 objets pour 2014). Dans ce contexte, j'ai une définition assez conservatrice du terme "objet" et j'ai souvent tendance à regrouper plusieurs objets en un seul (exemple : "1 sac contenant 9 vieux habits", "1 sac contenant 15 équipements électroniques", etc.).
  • Plusieurs de mes buts annuels sont consacrés à des tâches de fond d'archivage (scan de mes anciens papiers datant d'avant 2005, rip/archivage d'anciens CD-R/DVD-R avec des fichiers personnels, rip de mes DVD achetés, etc.). Ce sont des projets qui prennent beaucoup de temps, comme j'ai eu tendance à accumuler énormément de documents et supports de données depuis mon enfance.
  • Depuis 2011, je n'achète plus de DVD. Le dernier que j'ai acheté est le coffret de 10 DVD "The Definitive Miles Davis At Montreux DVD Collection 1973-1991". Je n'ai jamais acheté de Blu-ray. Pour les films et les séries, je suis désormais passé aux téléchargements.
  • Depuis 2012, je n'achète plus de CD. Mon dernier achat est Alter Ego de Yaron Herman. Depuis, j'achète toute ma musique au format FLAC sur des magasins en ligne tels que Qobuz.
  • Depuis des années également, je n'achète plus de livres en papier pour mes lectures personnelles. J'ai fait quelques exceptions pour des livres de programmation, dont je voulais faire profiter mes collègues de travail, mais le partage de fichiers PDF (de toute manière vendus avec la version papier par certains éditeurs) est finalement tout aussi facile et plus pratique (possibilité de rechercher des termes dans le document, etc). On ne m'y reprendra donc probablement plus. J'ai aussi entrepris de vendre ou donner mes anciens livres.
Concernant ce dernier point, on touche là à quelque chose de sacré, la plupart des gens traitant encore le livre en papier comme un objet très important dans leur vie. Lorsque je parle de ma démarche, j'entends souvent des personnes me dire leur besoin de toucher le papier, de le sentir, de plier les pages, de les annoter et d'exposer leurs livres dans une bibliothèque, comme s'ils faisaient partie de leur identité (ce que je peux parfaitement comprendre - je travaille en quelque sorte à une version virtuelle de ce concept). Mais c'est un phénomène normal. Il y a une peur de la dématérialisation. On la remarque dans d'autres domaines également (retour en force du vinyle depuis une dizaine d'années en tout cas, par exemple).

Il existe de nombreux "canaux" pour se débarrasser de ses possessions :
  • Les canaux habituels, utilisés quasiment au quotidien - poubelles ; containers à papier/carton, bouteilles en verre, PET, piles, capsules Nespresso, vieux habits, etc. ; déchèteries ; magasins reprenant les appareils électroniques, etc.
  • Les sites de vente en ligne. En Suisse, la référence en la matière est Ricardo, mais j'ai utilisé eBay à nouveau cette année, pour la première fois depuis 2006, pour vendre des objets plus "internationaux" (disques rares). L'ergonomie de ce site est épouvantable, mais il remplit sa fonction. Pour les ventes à prix fixe, il est aussi possible de passer par les sites de petites annonces.
  • Les groupes/forums pour donner des objets. Il y a quelques années, j'avais "abandonné" un livre que je n'avais pas réussi à vendre dans la bibliothèque d'un café/restaurant. L'essai a été concluant, mais pour d'autres types d'objets ou de plus grandes quantités de livres, il faut plutôt se tourner vers des groupes tels que "Objets à donner sur Lausanne et région" sur Facebook. Mon expérience a été pour l'instant très positive. Les réponses sont très rapides, arrivant parfois déjà moins d'une minute après la publication d'une offre. Les personnes sont quelques fois très enthousiastes : deux étudiants m'ont offert du chocolat en échange de livres ou d'un caquelon à fondue usagé que je leur donnais.

Il est rare que les ventes d'objets usagés rapportent véritablement de l'argent. Entre la préparation de l'enchère (photos, description textuelle, etc.), l'emballage et l'envoi par la poste, c'est surtout un assez grand investissement de la part du vendeur. Il serait parfois plus simple de jeter ou recycler l'objet. Non, l'intérêt est ailleurs. Le but, c'est que l'objet "continue sa vie" chez une autre personne, plutôt que de finir dans une décharge ou brûlé. Ou je ne sais où, d'ailleurs.

Au final, ce que j'apprécie, ce n'est pas tant le fait de me débarrasser de mes possessions, ce qui prend du temps et de l'énergie, comme je l'ai dit, mais le fait de posséder moins, de pouvoir vivre dans un lieu plus simple, plus dépouillé, plus propice à la détente ou à la concentration. Comme Paul Graham l'écrit dans "Stuff", nous possédons trop de choses. Chaque objet dans notre environnement est une source potentielle de stress, car il est susceptible de représenter indirectement une tâche à effectuer, que l'on procrastine, peut-être. Ou, pire, d'être volé ou détruit dans un incendie. Avoir moins d'objets, c'est aussi donner plus de sens à chaque possession. Un souvenir. Un tableau. Un élément de décoration. Avoir plus d'objets, c'est au contraire la dilution du sens, ainsi que le signe d'une certaine désorganisation, d'un certain dépassement.

Sur le long terme, c'est donc plus une philosophie de vie que je cherche à atteindre. Pour posséder moins, il faut consciemment décider d'acquérir moins de choses et, autant que faire se peut, se débarrasser de ce qui est devenu inutile, dès que possible. J'aime bien les règles de type "one in, one out", voire "one in, two out" (ou plus). Ce sont des règles simples, qui permettent de se poser les bonnes questions, au bon moment.

A encore plus long terme, je dois avouer que je suis complètement fasciné par des initiatives telles que le "100 Thing Challenge". Plus que le but en soit, que je me vois mal atteindre concrètement un jour, ce sont la démarche et la réflexion qui l'accompagne qui me parlent.

Je pourrais encore aborder les liens entre le minimalisme, Getting Things Done (GTD) et la méditation, mais ce sera peut-être pour un prochain article. Ce qui est certain, c'est que notre déménagement, cet automne, n'est qu'une étape, une sorte de nouveau départ, dans cette attitude que je cherche à avoir vis-à-vis de la consommation.

Monday, February 24, 2014

Un pas vers le végétalisme / véganisme

J'avais décidé de ne pas prendre de résolutions en 2014, mais je n'ai pas pu m'empêcher de mettre en pratique une idée qui me trottait en tête depuis quelques temps.

Cela fait 17 ans que je suis végétarien et, depuis de nombreuses années, je consomme régulièrement du lait de soja, ainsi que des yaourts au soja, une pratique plus liée au végétalisme qu'au végétarisme. J'ai récemment aussi cherché à diminuer mon utilisation de produits animaux, tels que le cuir, privilégiant par exemple l'achat de pantoufles en tissu, plutôt qu'en cuir, un comportement, à nouveau, courant en véganisme, mais pas dans un végétarisme de base.

Il y a quelques mois, j'ai découvert Vegusto, une marque de produits végétaliens, qui comprend un substitut de fromage appelé No-Moo. Après quelques hésitations, fin janvier, j'ai franchi le pas : j'ai commandé plusieurs variantes du produit No-Moo, ainsi que d'autres produits plus traditionnels (pour moi, tout du moins), comme de la "charcuterie" et autres saucisses végétaliennes.

Peu importe les marques ou les détails de cette démarche. L'important, c'est que c'est la première fois que j'essaie un substitut de fromage. Je dois admettre qu'on est relativement loin d'une véritable alternative végétalienne, d'une copie chimiquement exacte d'un vrai fromage (qui représenterait à mes yeux une sorte de Saint Graal), mais c'est pour moi un pas supplémentaire en direction du végétalisme. Et ça n'est pas anodin, car je me retrouve un peu dans la peau d'un non-végétarien débutant essayant de se passer de viande ou de poisson. J'aime le fromage. En consommer moins pour des raisons morales n'est pas facile. Il y a le problème du goût (au risque de me répéter, le fromage, c'est bon), mais aussi des raisons plus pratiques, comme l'absence quasi-totale de restaurants végétaliens, alors même qu'il devient de plus en plus facile de trouver des plats végétariens dans des restaurants normaux (on assiste à une certaine démocratisation, quoique assez lente, du végétarisme). Il y a aussi l'incompréhension de mon entourage.

Bref, ça n'est pas demain la veille que je vais m'arrêter totalement de consommer du fromage (je pense en particulier à la fondue et à la raclette), mais No-Moo est un produit qui va m'aider à diminuer légèrement ma consommation de produits animaux et c'est déjà un bon début.

Saturday, January 11, 2014

2013 en chiffres

Comme je l'avais déjà fait pour 2012 et 2011, voici un petit point "geek" sur mes activités de 2013.

En 2013, donc, j'ai :
  • acheté 16 albums (dont 15 au format FLAC et 1 au format MP3) (+6)
  • écrit 11 articles sur mon blog (+0)
  • vu 13 concerts (dont 9 dans des festivals) (-8)
  • fait 47 sessions de crosstrainer (17 heures au total) (+36)
  • reçu (resp. envoyé) 13468 (resp. 3262) emails (-2747 / -617)
  • vu 6 expositions (+3)
  • vu 22 films (dont 10 au cinéma) (+1)
  • lu 11 livres (+5)
  • médité 111 fois (34 heures au total)
  • écouté 4038 morceaux de musique (-171)
  • vendu, donné ou recyclé 28 objets (+16)
  • vu 4 pièces de théâtre (-2)
  • fait 8148 photos (+2465) - en comptant les photos HDR, qui biaisent le résultat
  • eu 5 rhumes (+1)
  • découvert et regardé régulièrement 1 série télévisée (-1)
  • publié 1128 tweets (+297)
  • fait 5 voyages à l’étranger (+2)
Un point sur mes résolutions pour 2013 :
  • "Me remettre à la méditation" : réussi ; 111 sessions en 2013 contre zéro en 2012.
  • "Lire plus de livres." : réussi ; 11 en 2013 contre 6 en 2012.
  • "Faire plus de sport." : réussi ; 47 sessions de crosstrainer en 2013 contre 11 en 2012 ; quelques randonnées en montagne (malheureusement pas assez).
  • "Regarder plus de films classiques et retourner à la cinémathèque." : réussi mais peux mieux faire ; nous sommes retournés 2 fois à la Cinémathèque de Lausanne, pour y voir Manhattan et One Flew Over the Cuckoo's Nest ; j'imagine que Forrest Gump (vu à la maison) compte aussi comme un classique.
  • "Boire plus de thé." : difficile à quantifier, mais il me semble avoir fait un léger effort sur ce point, essentiellement en profitant de la présence d'une machine Special.T au travail.
  • "Boire du café de meilleure qualité." : à nouveau difficile à quantifier ; pas vraiment de progrès sur ce front, je pense.
  • "Continuer à diminuer le nombre de mes possessions physiques." : réussi ; j'ai vendu, donné ou recyclé de nombreux objets, dont pas mal de DVDs ; j'ai également continué un travail de fond concernant mes archives personnelles, me permettant de jeter passablement de vieux papiers, supports numériques désuets, etc. ; enfin, j'ai décidé de ne plus jamais acheter de médias physiques (CDs, DVDs, Blu-rays, livres en papier, etc.).
  • "Améliorer le rapport signal/bruit des informations que je lis." : plus ou moins réussi ; la disparition de Google Reader et le passage à Feedly a été l'occasion de faire le tri dans les flux que je suis.
  • "Continuer à apprendre." : réussi ; pas mal de livres sérieux dans mes lectures, ainsi que de nombreux articles, mais aussi plusieurs cours que j'ai suivis en entier sur Coursera ("Calculus One" de Jim Fowler, "Neural Networks for Machine Learning" de Geoffrey Hinton et "Principles of Reactive Programming" de Erik Meijer, Martin Odersky et Roland Kuhn).
En dehors de ces résolutions volontairement vagues, j'avais également 17 buts personnels quantifiables (archivage de données personnelles, lecture, écriture, sport, etc.). J'ai atteint 14 de ces buts.

Pour mes résolutions 2014, j'ai envie de "prendre les mêmes et recommencer", pour ainsi dire. En réalité, plus que des résolutions annuelles, ce sont des principes de vie que je souhaite suivre.

Saturday, January 4, 2014

Mes lectures de 2013

J'ai lu onze livres en 2013. Presque un par mois. Ça n'est pas beaucoup, mais, comme je le disais déjà l'année passée, si je lisais uniquement du Nothomb, je pourrais lire plus de cinquante livres par année sans trop de difficultés !

Cette année, j'ai vraiment réalisé qu'il était difficile de lire un livre non fictionnel : il y a toute la problématique de la prise de notes, mais également la question de savoir ce que l'on fait de ses notes, une fois le livre terminé ; il faudrait écrire des résumés structurés, mais l'exercice est long. Cette année, je me suis contenté de regrouper mes notes Kindle et de les publier sur mon blog, quasiment telles quelles.

Je m'efforce depuis maintenant deux ans de lire en tout cas un "classique" par année (littérature francophone ou autre). Une des difficultés de cette contrainte est que les oeuvres dites classiques sont quasiment toutes plus longues les unes que les autres (Guerre et Paix, par exemple).

1. How to Create a Mind: The Secret of Human Thought Revealed, Ray Kurzweil (notes)

Un titre un brin prétentieux pour un livre somme toute bien écrit. C'est le cinquième livre de Ray Kurzweil que je lis et, malgré une certaine répétition (superficielle) de ses idées, il est toujours fascinant de se plonger dans le monde de l'intelligence artificielle, auquel je m'intéresse depuis presque vingt ans. Surtout qu'il semblerait que Kurzweil ait enfin décidé de passer de la théorie à la pratique, en rejoignant Google en décembre 2012, quelques mois avant Geoffrey Hinton, un des plus grands spécialistes des réseaux de neurones artificiels et du deep learning.

2. What I Believe, Bertrand Russell (notes)

J'ai décidé de lire ce livre après avoir terminé The Moral Landscape, de Sam Harris, en 2012. Bertrand Russell m'impressionne par sa clarté de pensée. C'est le premier et unique livre, pour l'instant, que j'ai lu de lui, mais certainement pas le dernier (j'ai acheté son Histoire de la philosophie occidentale, il y a quelques mois). Le titre de ce court livre m'a inspiré celui d'un article récent ("Ce que je crois").

3. Le Voyage d'hiver, Amélie Nothomb

Une première pause avec un livre très facile à lire.

4. Le Mythe de Sisyphe, Albert Camus (notes)

Une lecture à nouveau sérieuse. Très sérieuse. Dès la première page, l'introduction plante tout de suite le décor : "Il n'y a qu'un problème philosophique vraiment sérieux : c'est le suicide. Juger que la vie vaut ou ne vaut pas la peine d'être vécue, c'est répondre à la question fondamentale de la philosophie." Un thème a priori désagréable, mais qu'il est absolument indispensable d'aborder ouvertement, sans détours.

5. Le Vieil Homme et la Mer, Ernest Hemingway

Je suis végétarien, mais les aventures du pêcheur d'Hemingway m'ont tenu en haleine du début à la fin. Le but était à la base de lire un classique. Je ne sais pas ce qui m'a pris, mais je me suis mis à lire la traduction française de Jean Dutourd, au lieu de la version anglaise. Une erreur que je corrigerai un jour, sans doute...

6. A Universe from Nothing, Lawrence M. Krauss (notes)

Je connaissais Lawrence M. Krauss pour l'avoir vu plusieurs fois en vidéo, lors de conférences ou de débats. Ce que j'ai particulièrement apprécié dans ce livre est que, comme celui de Camus, il s'attaque à une question fondamentale, en l'occurrence celle de savoir pourquoi il existe quelque chose plutôt que rien, avec toutes les implications philosophiques que les connaissances scientifiques actuelles entraînent. Un livre frustrant, d'un certain point de vue, comme il laisse le lecteur avec plus de questions que de réponses.

7. The Selfish Gene, Richard Dawkins

Un classique de la vulgarisation scientifique. J'ai toujours été fasciné par l'élégance et le pouvoir explicatif de la théorie de l'évolution par la sélection naturelle, mais je n'avais jusqu'alors lu aucun ouvrage complet sur la question. Ma compréhension du domaine, intuitive, me venait essentiellement d'un projet de recherche sur lequel j'ai travaillé et dont le but était de faire évoluer des réseaux de neurones artificiels grâce à des algorithmes génétiques (pour simplifier).

8. Métaphysique des tubes, Amélie Nothomb

A nouveau une pause entre deux lectures sérieuses.

9. Pantagruel, François Rabelais

Un autre classique. Au lieu de lire la version en français moderne, je me suis forcé à lire la version en moyen français. La lecture en a évidemment été plus difficile (et interrompue par la lecture de nombreuses notes), mais aussi plus authentique.

10. Pierres à cupules et autres pierres gravées: Verbier, Bagnes et Entremont, Gilbert Bruchez, Philippe Curdy et François Baillifard

Le livre de mon père, publié en 2009. J'avais commencé à le lire il y a environ deux ans, mais, depuis que j'ai un Kindle et comme je lis essentiellement dans les transports publics, j'ai naturellement tendance à négliger les livres en papier, surtout s'ils sont volumineux.

11. Scala in Depth, Joshua D. Suereth

A nouveau un livre, acheté en 2012, dont j'avais interrompu la lecture après quelques chapitres. Il s'agit d'un ouvrage technique, le seul que j'ai lu en 2013. Je programme exclusivement en Scala pour mon travail depuis l'été 2011 et me tiens constamment informé de tout ce qui se passe autour de ce langage (on pourrait parler de formation continue personnelle), mais après une quarantaine d'heures par semaine passées au contact de ce langage, pourtant très intéressant, il est parfois difficile de se motiver à lire des ouvrages hyper-pointus sur le même sujet !

Quelques achats récents (versions Kindle - je suis régulièrement victime de la fonctionnalité "Buy now with 1-Click" d'Amazon !) :

Bref, je n'aurai pas trop de problèmes à trouver de quoi lire en 2014 !