Il y a quelques jours, sur le parking d'un magasin, mon amie et moi-même avons été abordés par une jeune fille, peut-être une étudiante, nous demandant, sans introduction aucune, ce que nous pensons des jeunes qui "bougent" pour faire avancer leurs projets. "Probablement un sondage", me dis-je. Une question vague dont la réponse est pourtant évidente : nous pensons qu'il est positif que les jeunes s'impliquent dans des projets. Nous exigeons tout de même quelques précisions. Quelles sortes de projets ? Qu'entend-elle par "bouger" ? La conversation est engagée. Notre curiosité est piquée. Malgré nous. S'ensuit un discours assez bien rodé de la part de la jeune fille concernant une nouvelle publication réalisée par de jeunes écrivains et poètes. Qu'il serait bien cruel de décourager, j'imagine. Le numéro n'est pas vraiment bon marché, mais cela n'est pas un problème. En effet, il n'est pas nécessaire d'acheter un abonnement. La jeune fille est souriante et enthousiaste. C'est très efficace.
Je suis certain que, ce jour-là, de nombreuses personnes lui auront acheté ce qu'elle vendait. Et je serais peut-être moi-même tombé dans le "panneau", il y a quelques temps. De peur de décevoir la personne en face de moi. De peur d'être pris pour quelqu'un qui n'encourage pas les jeunes dans leurs projets. De peur de me contredire.
Et c'est bien là le fonctionnement du discours de la jeune fille : amener la personne, "librement", à n'avoir plus qu'un seul choix, celui d'acheter. Durant toute la durée de notre conversation, je n'ai pas cessé de penser à un livre que j'ai lu il y a deux ans et que je ne peux que recommander : Petit traité de manipulation à l'usage des honnêtes gens, de Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois. On y retrouve les mécanismes qu'a utilisés la jeune fille du parking et bien d'autres : dépense gâchée, piège abscons, escalade d'engagement, effet de gel, amorçage, leurre, porte-au-nez, pied-dans-la-porte, pied-dans-la-bouche, pied-dans-la-mémoire, toucher, crainte-puis-soulagement, étiquetage, mais-vous-êtes-libre-de, etc.
Les techniques de manipulation sont nombreuses. Certaines sont évidentes. D'autres sont plus subtiles. Toutes sont régulièrement utilisées quotidiennement, en management ou en marketing, bien entendu, mais aussi, de manière plus générale, dans toutes les relations humaines. Nous n'en sommes tout simplement pas toujours conscients, car nous sommes tous des manipulateurs.
Alors, à quand remonte la dernière fois que vous avez été manipulés ?
3 comments:
Cher ami, un autre style de manipulation - il sévit à l'heure actuelle une "craze" monstrueuse chez les 6-12 ans, les "Bakugans" (voir http://www.bakugan.com/fr/products/index.html)
Bref, me trouvant chez Manor avec mes enfants, très désireux de se faire offrir des figurines, je constate qu'il n'y a aucun prix affiché...enquête faite, j'ai appris du chef de rayon que c'est intentionnel, nombre de parents se trouvant malgré eux aux caisses avec des Bakugans finissent par céder sous la pression de leurs enfants, malgré les prix élevés (il est vrai qu'à 35 francs trois malheureuses petites figurines de plastique, c'est vraiment l'arnaque!)
Tiens, étrange. Dans ce genre de situations, le fait de ne pas afficher de prix devrait être illégal. C'est effectivement une forme de manipulation. Silencieuse, mais de la manipulation quand même.
Je viens à peine de découvrir ce blog, mais j'avais envie de réagir à cet article, car je sais combien il est difficile de ne pas se laisser entourlouper dans ce genre de situation (ayant longtemps été un grand naïf moi-même).
C'est pourquoi il est préférable de s'éduquer à ces méthodes car cela permet de ne plus se laisser berner.
Le petit traité de manipulation à l'usage des honnêtes gens de Robert-Vincent Joule permet en effet de comprendre et de reconnaître la plupart de ces stratagèmes. Et c'est vraiment utile vu le monde dans lequel on vit...
Au plaisir de te lire, bonne continuation.
Post a Comment